Le sol sous la vache : ces bactéries qui y prolifèrent (maladie de Mortellaro)

Conditions idéales pour la maladie de Mortellaro

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Imaginez-vous dans la situation suivante : un matin, une de vos vaches boîte.
Vous regardez rapidement sur internet, boiterie bovine, etc.

Et vous tombez sur cet article :  “Quand la vache boîte, il est déjà trop tard.”


Coup de stress. Non seulement Web-agri  y détaille les symptômes de la maladie de Mortellaro, mais il explique que son origine est encore mal connue. Les bactéries principales ont été identifiées (de type tréponème), mais de nouvelles apparaissent.
Et d’insister sur le lien avec les milieux humides et sales .


Pourquoi c’est stressant


Selon l’expert, « L’hygiène est fondamentale. La constitution du sol a son importance et le raclage est à bien réfléchir. Aujourd’hui, on conseille aux éleveurs de passer le racleur toutes les deux heures.»

Toutes les deux heures ? Voilà de quoi perturber un emploi du temps déjà chargé. De quoi remettre en question un équilibre économique souvent difficile. Tout ça à cause de bactéries qui ont tendance à se développer. 

 Si l’on poursuit la recherche, on découvre des témoignages qui ne vont pas forcément rassurer. Tel celui de Marc Braidy,  publié dans Réussir, qui raconte ses difficultés depuis l’introduction de cette maladie dans son cheptel et le coût (7500 euros annuels) de parage (traitement des pieds) des bovins pour prévenir la maladie. 

Mortellaro et dermatites: mieux vaut prévenir.


Retour à la réalité. Nous étions dans un mauvais rêve, rappelez-vous. Tant que vous n’êtes pas dans un tel scénario, il vous reste de quoi agir en mode préventif. 

Les bactéries qui sont à l’origine de ce cauchemar sont d’un type bien précis : les tréponèmes.  Treponema medium, Treponema phagedenis et Treponema denticola, pour être précis et faire les présentations. Leur point faible : elles sont anaérobie. Elles meurent au contact de l’air.

Ces micro-organismes sont indispensables à l’émergence de la pathologie, mais ne déclencheront la maladie que sous certaines conditions spécifiques. Plusieurs éléments contribuent à la survenue de la maladie de Mortellaro :

– La présence d’humidité et le manque de propreté dans les zones de déplacement

– L’introduction de nouveaux bovins peut être un vecteur de la maladie : un troupeau auparavant sain peut être infecté par l’arrivée d’un animal porteur de la maladie.

– Un régime alimentaire déséquilibré

– Le stress

– La visite de personnes extérieures (comme les inséminateurs, les vétérinaires, etc.)

– Il est possible qu’une transmission inter-élevages se produise via les équipements utilisés pour le parage.

Les deux facteurs de risque les plus couramment observés

– Le défaut de propreté des sabots : l’humidité entraîne une macération et une vulnérabilité accrue de la peau, tandis que les zones de déplacement insuffisamment nettoyées créent un environnement anaérobie (dépourvu d’oxygène) causé par les excréments restant sur les sabots des bovins.

– La propreté de l’environnement immédiat : un sol mouillé constitue un terrain propice à la dissémination de micro-organismes et de bactéries responsables de la maladie de Mortellaro. Les sentiers boueux menant aux champs sont des zones parfaites pour la prolifération des micro-organismes et des bactéries. Ainsi, les maladies ont la possibilité de se transmettre aisément par les membres des bovins.


La boue : un risque majeur


On le voit, la boue est un risque important dans le développement de ces bactéries. Et dans la mesure où ces maladies ont tendance à se propager (voir ces statistiques de 2021 dans l’Aisne conduites sur des ateliers d’engraissement touchés par des animaux contaminés : 16% des animaux ont dû être vendus précocement), parmi les bonnes décisions pour éviter les soucis figure donc le fait d’éviter la boue et de s’intéresser aux relations entre vos sols et ces détestables bactéries..


Les bactéries anaérobies sont des organismes qui prospèrent dans des environnements dépourvus d’oxygène, un état souvent trouvé dans les sols saturés d’eau ou extrêmement boueux. Ces conditions sont particulièrement propices à la croissance bactérienne anaérobie en raison de la structure compacte du sol, qui empêche la circulation de l’air et crée des poches où l’oxygène est soit limité soit complètement absent. Dans ces micro-environnements, les bactéries anaérobies peuvent se reproduire rapidement et établir des colonies, déclenchant une série de processus biologiques et chimiques qui peuvent avoir des effets profonds sur l’écosystème du sol.

L’un des processus clés initiés par les bactéries anaérobies est la fermentation, où les organismes décomposent les matières organiques en absence d’oxygène, produisant une variété de sous-produits, dont certains peuvent être nocifs pour la santé des plantes et des animaux. Par exemple, certaines bactéries anaérobies produisent des toxines comme le botulisme, qui peuvent contaminer les sources d’eau et être extrêmement dangereuses pour la faune, le bétail et même les humains. De plus, la décomposition anaérobie peut conduire à la production de gaz comme le méthane, un puissant gaz à effet de serre, et l’hydrogène sulfuré, qui est toxique à fortes concentrations.

En outre, les sols boueux ou saturés d’eau peuvent entraver la croissance des plantes. Les racines nécessitent de l’oxygène pour respirer, et en l’absence de celui-ci, elles peuvent être asphyxiées. Les conditions anaérobies peuvent également encourager la prolifération de maladies des plantes causées par des bactéries, affectant la santé globale des écosystèmes végétaux et réduisant la biodiversité.


Perméabiliser pour éviter tout cela


Face à ces défis, la perméabilisation du sol apparaît comme une solution cruciale. En améliorant la structure du sol pour faciliter le drainage de l’eau, on peut réintroduire de l’oxygène dans le sol, inhibant ainsi la croissance des bactéries anaérobies. La perméabilisation peut être réalisée de plusieurs manières, notamment en incorporant de la matière organique ou du sable pour améliorer la texture du sol, en creusant des tranchées de drainage ou en installant des systèmes de drainage artificiels. Ou bien sûr, en installant des dalles de stabilisation du sol.

Un sol bien drainé n’est pas seulement moins propice à la croissance des bactéries anaérobies; il est également plus sain pour la croissance des plantes. Les racines reçoivent l’oxygène dont elles ont besoin, l’eau est disponible mais pas excessive, et les nutriments sont maintenus en équilibre, car ils sont moins susceptibles d’être lessivés ou déséquilibrés par des conditions anaérobies.

Mais surtout, quand il s’agit de sols non cultivés (chemins, etc.), un sol bien drainé est moins susceptible de s’éroder, préservant ainsi sa capacité de résistance mécanique. Il ne s’écroulera pas sous le poids des bovins qui passent, notamment. 

En fin de compte, la perméabilisation du sol est une stratégie essentielle pour maintenir des écosystèmes terrestres sains. Non seulement elle contrôle la prolifération des bactéries anaérobies, mais elle favorise également une structure des sols robuste et contribue à la santé globale de l’environnement – un avantage qui, dans le contexte de l’agriculture moderne, est d’une importance vitale.